Discours - Droits des LGBTQIA+ : Faire vivre l'égalité pour toutes et tous !
Discours d'Emmanuel Grégoire
Jeudi 15 mai 2025

Mes chers amis,
Je suis heureux, et j'ai envie de dire fier aussi, d'avoir partagé ce moment avec vous. Merci à chacune et à chacun de votre présence. Merci surtout à celles et ceux qui l'ont rendu possible, en particulier à Isabelle Roy et Florian Sitbon.
Vous me direz, mais pourquoi échanger, ce soir, avec les voix du monde lesbien, gay, bi, trans, queer, intersexe, asexuels, et toutes celles et ceux qui éprouvent et défendent la conviction que leur identité est composite, et surtout qu'elle n'est pas figée et qu'elle peut évoluer ? Pourquoi réunir ici toutes vos voix, nos voix, et réfléchir ensemble aux leviers à activer pour faire progresser l'égalité ? Pourquoi avoir choisi cet arrondissement qui a vu naître la Manif pour tous pour tenir notre réunion ?
D'abord parce que la fierté n'est pas réservée à quelques arrondissements, ni limitée à quelques semaines dans l'année. Elle se vit partout, se construit partout, se défend partout. Dans chaque quartier de Paris. Au quotidien. Dans l'espace public. Dans la vie associative. Dans la vie culturelle. Faire vivre des droits et en gagner de nouveaux, combattre pour l'égalité est un travail du quotidien. Peut-être plus encore là où on est le moins attendu.
Ensuite parce que les gens peuvent changer. Car si les gens ne changent pas, alors à quoi bon faire de la politique ? Et si les gens ont changé, nous le devons d'abord au mouvement LGBTQIA+ qui a protesté, combattu, convaincu, pour faire évoluer la législation et nos institutions - pour qu'elles protègent, qu'elles libèrent, qu'elles célèbrent, et fassent progresser l'égalité.
Cette idée simple, cette idée que les gens peuvent changer, s'émanciper, est au cœur de notre histoire commune : celle de la gauche et celle du mouvement LGBTQIA+. Geneviève Garrigos et Denis Quinqueton, qui en ont été les acteurs autant que les témoins, et s'en sont même fait les historiens, le racontent mieux que je ne le ferai jamais. La lutte a connu des hauts et des bas. Elle a parfois connu des défaites. Mais ses militants, infatigables, se sont relevés lorsqu'il le fallait, pour arracher des victoires.
Depuis quelques années pourtant, la parole des anti-LGBTQIA+ s'est libérée. Nous l'avons encore vu de façon choquante hier avec l'arrachage du drapeau arc-en-ciel du bar La Boite dans le 4e arrondissement. La violence homophobe, et particulièrement transphobe, s'est répandue. L'arrivée de l'extrême droite au pouvoir en Europe - en Hongrie, en Italie, en Slovaquie, et peut-être dans quelques jours en Roumanie - les a galvanisées. Et depuis quelques années, les réseaux sociaux leur ont donné l'amplificateur qui leur manquait. Dans ce contexte, le retour au pouvoir de Donald Trump leur a donné des ailes.
En un coup de stylo, le nouveau locataire de la Maison Blanche a mis en péril la lutte contre le VIH dans le monde entier. Selon l'agence Onusida – dont la moitié du budget dépend de l'USaid – sans reprise du soutien des Etats-Unis, il y aura 6,3 millions de décès supplémentaires d'ici 2029. “On risque de retrouver des chiffres similaires aux années 1980-1990” prédisent déjà des experts. Cette politique est criminelle. C'est le monde entier qui risque d'en payer le prix, aucun pays ne sera épargné.
Ils se sentent prêts, désormais, à détruire ce qu'ils ont toujours honni : ces progrès accomplis depuis la Révolution, avec la Loi Le Chapelier de 1791, cet esprit de tolérance qui en est issu et qu'ils ont harcelé sans relâche tout au long du XIXe et du XXe siècle, et puis plus tard les premières marches, les premiers PACS, les premiers mariages, les premières adoptions, la PMA pour toutes, qui ont fait avancer l'égalité, même de manière incomplète.
Ils se sentent soutenus, désormais, dans leur projet d'imposer l'uniformité, l'homogénéité, leur aversion à la différence, à laquelle ils ont toujours aspiré.
Comme ils l'ont déjà fait par le passé, ils chercheront à effacer la loi. Comme leurs amis le font ailleurs, ils chercheront à effacer les voix. En supprimant les données de santé. En caviardant les travaux de recherche. En jouant avec les algorithmes, pour invisibiliser les combats. En déversant les discours de haine, pour assourdir les récits de toutes les fiertés. Et si cela ne suffit pas, en s'en prenant aux êtres qui résistent, à celles et ceux qui n'entrent pas dans leur vision du monde.
Les personnes trans sont les premières aujourd'hui à en payer le prix. Dans ce continuum de violence, de l'insulte jusqu'à l'agression physique, jusqu'à la volonté même d'entraîner la mort, le nombre de violences explose, vous l'avez dit avant moi. Les actes homophobes ont connu, plus largement, une recrudescence. Cela nous oblige à réagir et à agir.
Alors que faire ?
D'abord, je suis de ceux qui croient en l'action municipale. Celle des élues et des élus de proximité, directement en lien avec les habitants et vers lesquels on se tourne pour exposer ses problèmes, des plus banals aux plus dramatiques. Celles des élues et élus en lien sur le terrain avec les associations, les institutions, les autorités locales et qui font vivre au quotidiens les valeurs de la République qui s'adressent à toutes à tous. Celles des élues et des élus qui font preuve de volonté pour faire de la lutte contre les discriminations une priorité de leur mandat, qui sont plus globalement soucieux de mettre l'égalité et l'émancipation au cœur des politiques publiques.
➜ Mener le combat, c'est d'abord protéger les victimes. Inconditionnellement.
◼️ Le premier engagement que je prends, c'est d'affirmer que Paris sera toujours aux côtés des victimes. C'est ma première promesse, une promesse sans concession. Sans codicille. Ce que je veux redire ce soir, c'est que Paris est à leurs côtés. Paris sera toujours à leurs côtés. Nous mettrons en place un dispositif d'aide spécifiquement destiné aux personnes LGBTQIA+. Inspiré de l'initiative déjà en place dans le 19e arrondissement, ce dispositif s'organisera autour de deux axes : un Réseau d'Alerte et de Vigilance, un Réseau d'Aide aux Victimes. Ce réseau local visera à construire une politique concrète et efficace de prévention et de lutte contre les violences LGBTQIA+phobes. Il reposera sur un partenariat renforcé et une meilleure coordination entre tous les acteurs concernés dans l'arrondissement : police, professionnel·le·s de santé, travailleur·se·s sociaux, bailleurs sociaux et associations. Ensemble, nous agirons pour protéger, soutenir et accompagner les victimes. Paris ne détournera jamais le regard.
◼️ Le deuxième engagement que je prends, c'est de toujours faire de Paris une ville refuge. Cette mission s'inscrit dans son histoire. Elle l'a été par le passé, elle le sera demain. Être une ville refuge, c'est d'abord accueillir. C'est offrir un toit pour mettre à l'abri. C'est soigner celles et ceux qui en ont besoin. C'est aussi réparer les injustices et reconstruire des vies. Depuis 2023, la Bulle incarne pleinement cet esprit. Elle offre un accueil inconditionnel, un accompagnement administratif, psychologique et social, notamment aux personnes les plus précaires, et tout particulièrement aux migrant·e·s LGBTQIA+. Nous poursuivrons dans cette voie. Nous renforcerons ces actions. Et nous continuerons de soutenir, sans relâche, les associations qui, chaque jour, font de Paris un véritable refuge.
➜ Mener le combat, c'est lutter contre toutes les manifestations de haine.
◼️ Le troisième engagement que je prends, c'est de ne jamais hésiter à engager la Ville à porter plainte ou à se constituer partie civile dès lors des faits se sont produits sur son territoire et après avoir consulté les associations et les victimes. Je serai à ce titre très vigilant sur la lutte contre les agressions LGBTQIphobes ou sérophobes, qu'ils se déroulent sur les réseaux sociaux, dans des cercles privés ou dans l'espace public.
◼️ Le quatrième engagement que je prends, c'est la création d'une véritable délégation municipale dédiée à la lutte contre les discriminations. Sur le modèle de la Dilcrah, mais à l'échelle de la Ville de Paris. Paris dispose déjà d'équipes engagées, qui agissent chaque jour contre toutes les formes de discrimination : le racisme, l'antisémitisme, les violences sexistes et la haine anti-LGBTQI+. Elles conçoivent et mettent en œuvre des politiques publiques essentielles. Mais nous devons aller plus loin. Cette délégation municipale aura pour mission de coordonner l'action contre les discriminations de manière transversale, dans l'ensemble des services et directions de la Ville.
Lutter contre les discriminations ne peut être une politique parmi d'autres : cela doit être un fil conducteur de toutes nos actions. Nous voulons une réponse exemplaire, cohérente, et à la hauteur des enjeux. Et c'est ensemble que nous y parviendrons.
◼️ Le cinquième engagement que je prends, c'est de désigner dans chaque mairie d'arrondissement une ou un référent LGBTQIA+, c'est-à-dire une ou un agent formé aux problématiques de ces personnes. Il aidera les services à mieux les prendre en compte dans leur offre et à mieux comprendre les problèmes auxquels ils sont confrontés.
➜ Mener les combats, c'est toujours mieux accueillir, recevoir, orienter dans les services de la Ville.
◼️ Le sixième engagement que je prends, c'est d'amplifier la formation - initiale comme continue, en lien avec le CNFPT - des agents de la ville, et en particulier celle de nos agents d'accueil, de l'État civil, de nos policières et policiers municipaux. Ce plan de formation devra permettre :
De mieux accueillir et recevoir les personnes LGBTQIA+. Je voudrais saluer le travail de l'association féministe d'autosupport trans (Outrans) qui a préparé un module de formation pour bien accueillir les personne trans ;
D'être en capacité de mieux les écouter, de prendre leur témoignage avec bienveillance, de les orienter et de les accompagner lorsqu'elles sont victimes - ici aussi le “je te crois” est de mise.
Enfin, d'aider nos agents à mieux détecter et agir au plus tôt sur les violences du quotidien que sont le harcèlement scolaire, l'exclusion dans le sport, la souffrance au travail…
Je n'oublie pas que ces actions doivent aussi concerner les seniors et les Ehpad - notamment avec l'association Grey pad.
➜ Mener le combat, c'est poursuivre l'action de Paris et la Seine-Saint-Denis sans Sida.
Le virus ne touche pas que les personnes LGBTQIA+, mais elles y sont particulièrement exposées. C'est pourquoi :
◼️ Le septième engagement que je prends, dans le cadre de de Paris sans Sida, c'est de faire de la prévention un enjeu prioritaire. En multipliant les partenariats avec les associations et les institutions, les interventions dans les établissements scolaires, dans les centres d'animations, les points d'information jeunesse, les MVAC… Les campagnes de sensibilisation et de promotion de la Prep : trop de jeunes semblent oublier que le virus circule et qu'il est nécessaire de s'en protéger. Ces campagnes doivent pouvoir s'installer dans des antennes jeunes mais aussi être mobiles dans les quartiers pour toucher un maximum de jeunes en proximité. Une attention particulière devra être portée à la prévention du chemsex - une pratique à risques sur laquelle Jean-Luc Roméro nous alerte depuis plusieurs années.
➜ Mener le combat, ce n'est pas seulement protéger. C'est aussi prendre la parole.
Avec toutes et tous, sans relâche. Ce n'est pas juste une affaire de symbole. C'est aussi une lutte et vous le savez mieux que quiconque. Tenir la place. La revendiquer. Manifester notre fierté. Prendre la parole, c'est manifester notre fierté d'être une capitale LGBTQIA+.
◼️ Le huitième engagement que je prends, c'est de tenir avec vous le pavé pour l'égalité. Nous serons, évidemment, aux côtés des associations pour manifester notre fierté, celle d'être une capitale LGBTQIA+. En étant aux côtés des associations le 17 mai, c'est dans quelques jours, pour la Journée mondiale contre l'homophobie, la transphobie et la biphobie ; le 25 juin pour la marche des fiertés ; mais aussi le 31 mars pour la Journée de la visibilité trans et le 26 avril pour celle de la visibilité lesbienne…. En célébrant comme il se doit le cinquantième anniversaire de la première marche, en 2027 et les 400 pionnières et pionniers de République, qui ont marché, à l'invitation du GLH et du MLF, pour s'opposer - déjà - à la phallocratie, à la moralité, au virilisme. En pavoisant les maires d'arrondissement avec ces drapeaux aux couleurs de l'arc-en-ciel lors des rendez-vous de visibilité.
◼️ Le neuvième engagement que je prends, c'est non seulement de prendre la parole, mais aussi de soutenir les associations LGBTQIA+ et de leur donner la parole à l'occasion des forums des associations mais aussi des événements organisés par la ville (Nuit blanche, Bal de l'Amour- c'est demain, Fête de la musique,...). Cette visibilité devra être assurée dans tous les arrondissements.
➜ Mener le combat, c'est rendre visible les personnes LGBTQIA+ dans l'espace public.
Une capitale LGBTQIA+, c'est celle qui n'oublie pas, qui inscrit le combat vers l'égalité pour toutes et tous dans son espace public. Des personnes LGBTIA+ ont été chassées, pourchassées, victimes de drames qui jalonnent notre histoire. Leur mémoire, doit être honorée, elle a donc une place à prendre dans les cérémonies du souvenir organisées par notre municipalité.
◼️ Le dixième engagement que je prends, c'est de continuer à inaugurer des rues aux noms des combattants pour les droits LGBTQIA+ dans tous les arrondissements (comme nous l'avons fait avec Harvey Milk, Ovida Delect, Pierre Seel, ou la place des émeutes de Stonewall). Et je suis fier que Paris inaugure ce samedi, dans le 12e arrondissement, un mémorial aux victimes LGBTQIA+ de la déportation et des persécutions à travers l'histoire.
➜ Mener le combat, c'est s'assurer que l'émancipation, l'égalité, la lutte contre les haines et les discriminations doivent inspirer toutes nos politiques. Le combat pour l'égalité est universel.
◼️ Le onzième engagement que je prends, c'est d'accélérer Paris comme ville inclusive en travaillant avec les entreprises et les commerces pour promouvoir des politiques non discriminantes à l'emploi, en affichant une charte d'accueil et de bienvenue et en en faisant un critère dans l'attribution des marchés de la ville.
◼️ Le douzième engagement que je prends, c'est de mener une action spécifique auprès des adolescents. C'est un âge particulier. Celui de la découverte de soi. Des questionnements qui peuvent en découler. L'adolescence mérite une politique dédiée. En partenariat avec l'ARS et l'APHP et les associations,, je veux que l'on se soucie davantage du bien-être d'une population particulièrement exposée aux risques des maladies de santé mentale, aux suicides, aux comportements à risques. Ils sont à intégrer dans les politiques à destination de la jeunesse.
◼️ Le treizième engagement que je prends concerne l'information et la communication municipale (web, réseaux sociaux…). Informer, c'est lutter contre les préjugés, c'est changer les mentalités. Cela passe par la visibilité de toutes les familles, de toutes les citoyennes et tous les citoyens. Cela passe aussi par l'accès aux coordonnées et contacts des associations ou structures qui peuvent informer, ou aider les personnes LGBTQIA+. J'y veillerais.
◼️ Le quatorzième engagement que je prends concerne le sport inclusif. Vous connaissez mon attention à la question du Sport à Paris, c'est de travailler avec les clubs sportifs, qu'ils soient professionnels ou amateurs, à s'engager sur une charte contre l'homophobie dans le sport. Le monde sportif a déjà conscience de cet enjeu, il a avancé, il faut aller plus loin. J'aurais aussi une discussion avec les associations de supporters sont je sais que certains chants historiques peuvent tête ressentis dans un stade avec une violence par des personnes LGBTQIA+
Paris est la ville de l'amour, de l'amour pour toutes et pour tous. Elle doit continuer à l'être.
Vous l'aurez compris, à travers tous ces engagements, il ne s'agit pas de faire progresser les droits du quotidien pour quelques-unes ou quelques-uns. Ce dont il est question ici, c'est à travers le combat des associations LGBTQIA+, de faire vivre l'égalité pour toutes et tous. À travers vos combats, ce n'est pas une communauté que Paris privilégie, c'est l'universel que l'on porte pour faire de Paris une ville inclusive, une ville fière et bienveillante à chacune et à chacun. Fierté, dignité, égalité, c'est notre engagement.